Le prêche du 18 mai 2025

Le prêche du 18 mai 2025

Sur leur tapis de jeu, ils s’imaginent des jours heureux, demain.

Mes bien chères sœurs, mes bien chers frères,

Dès l’enfance, le jeu de la vie nous propulse dans le faire semblant. Certains s’imaginent qu’à l’adolescence, leurs bas instincts prenant le contrôle de leur petite personne, la réalité surgit, comme un diable sort de sa boîte. Mais ce n’est qu’une illusion : la réalité nous reste inaccessible. C’est à partir de là qu’il devient important – que dis-je, fondamental – de faire semblant.

Regardez ce Premier sinistre surfer sur le parjure en insultant les victimes, les témoins, les représentants de la loi, les enquêteurs. À quoi joue-t-il ? À s’imaginer bon chrétien tout en couvrant des pédocriminels pour préserver l’idée qu’il se fait de lui-même – et, accessoirement, son train de vie ? Je suis persuadée qu’il se prend pour un homme formidable.

Regardez ces élites qui s’empiffrent dans les ors en lorgnant la peau délicate de jeunes enfants. Ils inventent des mensonges à tour de bras pour ne pas perdre leur stature, leurs boursouflures. Entre deux lignes de coke, il leur arrive même de se prendre pour des humains, alors qu’ils ne sont que monstruosités. Ils se sentent invincibles derrière leur mépris. Pourtant, ils mourront comme les autres – peut-être avec cet aplomb qui poussa Jimmy Savile à faire graver sur sa tombe la graveleuse épitaphe : « C'était bon tant que ça durait ».

Regardez ces néo-croyants, faisant feu de tout bois, qui s’allument le cerveau en s’imaginant enfants des étoiles. Ils parlent d’« êtres de lumière », d’« êtres de conscience pure », alors qu’ils ne font que les poubelles des religions d’État, en se rêvant au-dessus de la mêlée. Ils n’ont d’autre appétence que de vendre leur vent à eux-mêmes, avant de le fouguer aux gogos.

Pleurez, devant ces laborieux, la peur au ventre, attentifs à ne pas rater la messe, l’émission de télé-réalité, le dernier jeu télévisé, l’énième ticket de loto qu’ils ne gagneront pas. Leur détresse se déguise sournoisement, au point qu’ils n’ont même pas le désir d’entrevoir le nouvel ordre mondial s’installer sur leur ventre.

Pensez à ces intellectuels de pacotille, en perpétuelle reconnaissance de soi, qui alignent les traits d’esprit pour se jouer de leur simple médiocrité. Pensez à ces masculinistes, retranchés dans leur musculature, défendre les idées d’un âge que l’on croyait révolu.

Et les nouvelles générations, me direz-vous ? Elles ont le nez dans leur smartphone, à attendre la confirmation qu’elles ne sont pas juste ridicules et inutiles. Ils sont tentés par les extrêmes en se rêvant inventifs. En les regardant aussi perdus, je m’interroge : se voient-ils, demain, courir en kaki dans la gadoue, baïonnette au canon, pour défendre le grand capital ? Se voient-elles, demain, violées par les hordes barbares, au nom du renouvellement de je ne sais quelle race ?

Tous jouent à se faire croire qu’ils sont dans la course, que la vie est une chose formidable, qu’il eût été dommage de rater tout ça. Sur leur tapis de jeu, ils s’imaginent des jours heureux, demain. Alors, inlassablement, ils se reproduisent avec les mêmes lacunes, les mêmes terreurs, les mêmes conséquences.

Et puis, il y a ceux dont le train normatif a déraillé. Je les appelle les cabossés. Pour mille raisons, les choses ne se sont pas déroulées comme rêvé. Privés d’illusions, ils savent que tout est faux, que tout n’est qu’un jeu sanglant d’attardés mentaux terrorisés par l’inéluctable.

Alors, si la colère les porte suffisamment haut pour qu’ils désarment, cessent de s’enivrer par tous les moyens et de s’autodétruire, une porte s’ouvre à eux : celle de la contemplation du vide et de la foi. Je l’ai déjà dit : en tant que carmélite déchaussée, j’appartiens à un ordre contemplatif et mendiant. Aussi, pour moi, avoir foi en quelque chose est réducteur.

Mes bien chères sœurs, mes bien chers frères, n’oubliez pas – même après trois Ricards – : la foi, portant sur toute chose, se développe naturellement sur le vide et n’a besoin d’aucun support. C’est un état d’esprit qui s’applique dans tous les recoins de notre vie.

Sœur Bertine

Bertine Van de Loo
Paul Rétif
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